Ce que nous sommes - David Cormand

Ce livre de David Cormand, ancien secrétaire fédéral d’EELV, euro-député et membre très impliqué du parti, permet de revenir sur les fondamentaux des écologistes, de nous projeter dans un avenir où l’écologie politique serait central.
Paru en 2022, après la Nupes mais avant le NFP, il capte un moment fugace du paysage politique français, tout en posant ce que sont les idées et les propositions des écologistes.

Temps de lecture estimé : 4 mn

L’auteur le dit dès le début : son ouvrage se situe dans un contexte, celui de la guerre en Ukraine. Aujourd’hui, soit deux ans après, on pourrait dire le début de la guerre en Ukraine. Hélas, alors qu’il était permis d’espérer que cette guerre soit courte, elle continue encore. Et à celle-ci a succédé la guerre à Gaza, aujourd’hui près de 100 000 morts palestiniens par Israël.

Le sous titre du livre est « Repères écologistes » et il permet de faire un récapitulatif de ce que peuvent être les positionnements des écologistes sur différents sujets : la guerre, et surtout l’idéal de paix des écologistes, en plaçant en perspectives nos dépendances aux énergies fossiles (le gaz russe pour ce qui concerne la guerre en Ukraine, mais cela pourrait tout autant être le pétrole), la non-violence et le pacifisme des écologistes, ainsi que les perspectives de défense européenne, alors que le rôle de l’OTAN a été critiqué.

La suite concerne les perspectives politiques, et les manquements de la social-démocratie, les promesses intenables car basées sur une idée de croissance et d’expansion infinie. Sur ce point là, l’écologie politique est une vraie rupture.

Je n’avais jamais vu David Cormand comme un farouche anti-capitaliste, et pourtant la deuxième partie est intitulée « le capitalisme, ce projet totalitaire ». Car si le capitalisme exploite les humains, il exploite également la nature. Il existe des réponses individuelles à la crise écologique en cours, mais « ce sera avant tout une affaire collective si nous voulons survivre et habiter la Terre sans la détruire et nous détruire ». Le consumérisme en prend bien sûr également pour son grade, puis il enchaîne sur le projet écologiste et ses valeurs : alerter et réparer, le court et long terme, penser l’autre.

Le renversement de la civilisation capitaliste passera par la suppression de la publicité et la régulation des GAFAM, opposant des plate-formes dont le modèle repose sur la publicité et la collecte des données à des projets ouverts et contributifs comme Wikipédia [1]. Sur le numérique, le dernier chapitre torpille le transhumanisme, cette idéologie décrite comme le stade suprême du capitalisme.

La troisième partie nous parle du projet de l’écologie, et là c’est plus sympa : ralentir, adoucir, atterrir. Les réflexions de David Cormand passent du travail au culte de la croissance, on parle justice, sécurité, démocratie.
Il ne fait pas l’impasse sur les différents leviers pour changer le monde : les résistances, les alternatives et les institutions.

La quatrième partie nous donne des clés pour aller « vers un monde meilleur ». Mais alors que le chapitre qui suit s’intitule « la prise en compte du vivant », on y trouve surtout la spécificité écologique et le fonctionnement du parti Europe Écologie Les Verts, comme le fait que nous n’ayons pas de « petit livre vert » mais une multitude de textes (comme des rhizomes dit David Cormand). La culture de la coalition que nous avons est également abordée, tout comme cet état d’esprit minoritaire que nous avons longtemps eu [2].
Le peuple de l’écologie existe, surtout parmi les intellectuels, mais nous ne valorisons pas assez les personnalités qui nous rejoignent [3]. Revenant rapidement sur le clivage droite-gauche, depuis longtemps tranché chez EELV maintenant, la volonté de faire bouger les choses, même en étant minoritaire, est très présente chez les écologistes : d’où l’envie toujours de participer à des coalitions. Notre volonté d’avoir un fonctionnement moins centralisé, que le parti tente de mettre en pratique en interne, se traduit politiquement avec plus de pouvoirs aux régions et aux intercommunalités. Le dernier chapitre de cette partie revient sur le rapport à la science, la nécessité de penser et redéfinir le progrès, et surtout d’allier ces choix à un processus démocratique.

Pour la cinquième et dernière partie, il s’agit d’une remise à plat des partis politiques français depuis quelques décennies. La décomposition des partis, les tentatives de recomposition, à droite comme à gauche, mais également le délitement du PS et de la social-démocratie. Il parle du triangle des Bermudes, entre RN, Macronistes et LFI. Une réalité qui prend corps en ce mois de juillet 2024, alors que l’Assemblée Nationale est divisée en trois groupes équivalents, mais ce n’est pas LFI seule : c’est toute la gauche et les écologistes au sein du Nouveau Front Populaire. Une union qui reprend ce qu’il a alors évoqué : Rupture, Radicalité, Révolution, tout cela sous le signe de l’écologie.
Il rappelle ensuite que les luttes sociales de ces dernières années rejoignent le combat écologiste, ou plutôt que les écologistes ont à coeur de les soutenir : les jeunes pour le climat, le féminisme et les violences sexistes et sexuelles avec le mouvement MeToo, les gilets jaunes, le racisme, la condition animale.
Et toutes ces luttes devraient se rassembler au sein de notre force politique pour aller vers une République écologique. Ce dernier chapitre reste résolument optimiste : l’avenir sera écologique, la voie est devant nous, et ce sera joyeux.

[1Il existe également des biais sur l’encyclopédie en ligne, mais qui seraient plus facilement régulables

[2mais qui est en passe de changer, j’espère

[3Cependant, ce n’est pas la même chose que de faire de la politique et d’être un⋅e intellectuel⋅le

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